Le musée départemental Albert-Kahn à Boulogne Billancourt (92) est consacré à la conservation, la diffusion et la valorisation de l’œuvre d’Albert Kahn (1860-1940), banquier philanthrope et humaniste, qui mit sa fortune au service de la connaissance, de l’entente entre les peuples et du progrès.
De cette œuvre foisonnante, le musée conserve des collections photographiques et cinématographiques uniques, les Archives de la Planète (1909-1931) et un précieux jardin, témoignage exceptionnel de l’art horticole au tournant du XXe siècle, qui fut le cadre de vie et d’inspiration du banquier. Albert Kahn a acquis, de 1895 à 1920, neuf parcelles auprès de douze propriétaires différents en vue de l’aménagement d’un jardin composé de scènes paysagères agrémentées de « fabriques » et de forêts. Il installe sur ce terrain un jardin qu’il aménage selon un genre particulier du XIXe siècle, le jardin dit « de scènes ». Les ambiances se succèdent : jardin japonais, jardin anglais, forêt dorée, forêt vosgienne, forêt bleue, jardin français, marais, prairie évoquent les paysages qui lui sont chers et reflètent son idéal de fraternité entre les peuples. Ces collections, restées relativement confidentielles au XXe siècle, s’ouvrent désormais au plus grand nombre, sur le site même de leur conception, la propriété d’Albert Kahn à Boulogne-Billancourt ainsi que sur le portail des collections en ligne : https://collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr/
Un parcours de visite entre images et jardin
Aujourd’hui, l’identité du musée, s’appuyant sur la singularité et la richesse de ce projet hors norme, se veut plurielle : un musée d’images tourné vers les questions de société, profondément ancré dans un lieu qui met le monde à portée de main. Le public y découvre un site de 4 hectares restructuré, alliant jardin, nouveaux bâtiments et restaurations respectueuses de l’histoire du lieu, qui accueillent le parcours permanent des collections, les expositions temporaires et une programmation culturelle foisonnante. Le nouveau musée dessiné par l’architecte japonais Kengo Kuma, lauréat du concours international lancé en 2012 et inauguré en avril 2022 s’inspire de la relation particulière d’Albert Kahn avec le Japon : le projet architectural met en scène le rapport de la ville, des collections d’images et du jardin. Le site est protégé depuis 2015 au titre des monuments historiques (inscription du jardin et du bâti ancien).
Dates clés
- 1860 : Naissance d’Albert Kahn.
- 1892 : Albert Kahn loue un hôtel particulier quai du 4 Septembre et achète progressivement plusieurs parcelles pour y installer un jardin.
- 1898 : Lancement des bourses Autour du Monde.
- 1906 : Création de la société Autour du Monde.
- 1909-1931 : Albert Kahn lance son projet de documentation du monde : Les Archives de la Planète.
- 1916 : Création du Comité national d’etudes sociales et politiques.
- 1926 : Installation d’un laboratoire de biologie et cinématographie scientifique.
- 1929 : Création d’un Centre de médecine préventive.
- 1936 : Acquisition par le Département de la Seine de l’ensemble de la propriété et des collections d’images suite à la faillite du banquier.
- 1937 : Première ouverture au public du jardin, en marge de l’exposition internationale.
- 1940 : Décès d’Albert Kahn.
- 1968 : Le domaine et les collections sont dévolus au département des Hauts-de-Seine lors de sa création.
- 1986 : Création d’un musée départemental afin de conserver, étudier et valoriser les collections.
- 2015 : Inscription du site au titre des monuments historiques.
Informations pratiques
• Le musée est ouvert du mardi au dimanche
• de 11h à 18h (d’octobre à mars) : dernière entrée à 17h, fermeture du musée et son jardin dès 17h30
• de 11h à 19h (d’avril à septembre) : dernière entrée à 18h, fermeture du musée et son jardin dès 18h30
• Fermeture le 1er mai, le 25 décembre et du 1er au 15 janvier inclus.
Biographie d’Albert Kahn
Abraham dit Albert Kahn naît le 3 mars 1860 à Marmoutiers (Bas-Rhin), il est l’aîné d’une fratrie de quatre enfants d’une famille de marchands de bestiaux de la communauté juive de la ville. Il arrive à Paris en 1876. Engagé en 1878 par la banque Goudchaux, il reprend des études avec comme répétiteur Henri Bergson, alors étudiant à l’ENS en 1881. Licencié es lettres en 1883 et en droit en 1885, il est réintégré dans la nationalité française la même année. Un voyage en Afrique du Sud pour les Goudchaux en 1888 lui permet à son retour de participer à l’introduction en Bourse de la De Beers Diamond Mining Co. L’ascension d’Albert Kahn est dès lors rapide : fondé de pouvoir en 1891, puis associé de la banque Goudchaux, il fonde sa propre banque en 1898, à la suite de deux voyages en Amérique et en Extrême-Orient au cours desquels il a lancé des investissements au Japon. Installé à Boulogne dès 1893, il entame en 1895 une politique d’acquisition de parcelles qui aboutit à la création d’un magnifique jardin de scènes paysagères. Albert Kahn consacre une grande partie de sa fortune à l’éveil de la conscience des élites dans le but d’instaurer la paix universelle. Il crée le projet philanthropique des Bourses autour du Monde, dont les lauréats forment à partir de 1906 la société autour du Monde. Il met à leur disposition un bâtiment de sa propriété qui devient un vecteur de rencontres internationales. Parmi les nombreuses fondations que le banquier finance, les Archives de la Planète se démarquent par leur originalité : cette entreprise créée en 1912 vise à recenser les différents aspects de la vie sur la planète, de la façon la plus objective possible, au moyen de la photographie en couleurs naturelles et du cinéma. Des opérateurs, spécialement engagés à cet effet, sont envoyés dans une cinquantaine de pays et rapportent 72 000 plaques de verre ainsi que des centaines de métrage de films. Les conséquences du krach boursier de 1929 entraînent l’arrêt des activités du banquier à partir de 1932 et le mènent à la ruine. Ses biens sont saisis et le département de la Seine rachète sa propriété, ainsi que les collections d’images en 1936. Albert Kahn meurt dans la nuit du 13 au 14 novembre 1940, quelques jours après le début de l’occupation allemande.
En 1968, le département des Hauts-de-Seine, nouvellement créé, devient propriétaire des jardins (ouverts au public dès 1937) et des collections. C’est vers 1975 que voit le jour un programme d’étude et de valorisation de ce patrimoine considérable. Sous la direction de sa première conservatrice, Jeanne Beausoleil, l’ensemble devient musée départemental en 1986 puis accède au statut « musée de France ». Le jardin est restauré et la première galerie d’exposition (aujourd’hui intégrée au nouveau musée), conçue par l’architecte Gérard Planes est inaugurée en 1990, ainsi qu’un jardin japonais contemporain, œuvre du paysagiste Fumiaki Takano. Au tournant des années 2010, un ambitieux programme de restructuration et d’agrandissement du musée est engagé par le département, qui donnera le jour en 2022 au musée actuel.